Secrétariat du Congrès stratégique atlantique des chefs des
Premières nations (Atlantic Policy Congress
Of First Nations Chiefs Secretariat)

Mémoire prébudgétaire présenté au
Comité permanent des finances de la Chambre des Communes

le 12 août 2011

Personne-ressource : John G. Paul, directeur exécutif

Atlantic Policy Congress of First Nations Chiefs Secretariat

Courriel : John.Paul@apcfnc.ca

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Résumé

Il est impératif que le gouvernement du Canada investisse dans les communautés et les peuples des Premières nations pour assurer leur apport intégral à l’avenir économique du pays. Il faut aux Premières nations du Canada atlantique une programmation et un financement fondés sur un partenariat innovateur pour soutenir la croissance continue de la participation des Premières nations aux pêches de l’Atlantique et assurer sa viabilité à long terme. Les investissements directs dans la programmation fondamentale des services de base des Premières nations doivent être accrus sur une période de dix ans pour appuyer et encourager l’autonomie et l’indépendance économiques, ce qui permettra d’assurer l’équité des services de base et la parité de conditions entre les Premières nations et tous les autres Canadiens.

Propositions pour libérer le potentiel des Premières nations

L’avenir de l’économie canadienne et de l’économie du Canada atlantique est lié au rôle essentiel des Premières nations, qui soutiennent et appuient le développement économique et aident à reconstruire nos communautés en tablant sur les atouts de cette économie. Le secrétariat du Congrès stratégique atlantique des chefs des Premières nations (Atlantic Policy Congress of First Nations Secretariat) est un organisme de recherche sur les politiques gouvernementales qui analyse et élabore des solutions culturellement pertinentes susceptibles de remplacer les politiques fédérales qui influent sur les communautés et peuples mi’kmaq, maliseet, passamaquoddy et inuit et qui représente 38 Premières nations du Canada atlantique et de la région gaspésienne au Québec.

Éducation et développement économique

L’éducation et le développement économique continuent d’être une donnée fondamentale de nos jeunes gens et un fondement de ce que nous sommes et de ce que nous deviendrons dans un proche avenir en tant que fiers peuples mi’kmaq, maliseet, passamaquoddy et inuit. Alors que le secteur privé et les gouvernements recherchent des ressources humaines, nos communautés et nos gens peuvent fournir une main-d’œuvre bien formée et très compétente capable de répondre aux besoins de tous les secteurs de l’économie. Les communautés cherchent avant tout à établir des valeurs et des croyances fermes qui permettent de passer de la dépendance à l’action et à la mobilisation. Ces actions commencent avant même que les enfants entrent dans le système scolaire et doivent être appuyées aux stades les plus précoces du développement au sein de la communauté afin de permettre aux parents et aux familles de mettre pleinement en valeur le potentiel humain de chaque enfant. Les enfants sont l’avenir de toutes les communautés et il importe au plus haut point qu’ils fassent l’expérience d’un bon départ dans la vie. L’apprentissage doit être enraciné dans nos valeurs, dans nos traditions et dans nos langues pour faire en sorte que les enfants qui deviennent des jeunes et des adultes fassent un apport à nos sociétés et améliorent le sort de notre population. Grâce à ces améliorations, le savoir contribuera à la société, à l’économie de chacune de nos communautés, à l’ensemble de la région, notamment à l’économie régionale.

La valeur de l’éducation et les résultats obtenus par l’intermédiaire des personnes éduquées et compétentes peuvent enrichir tous les aspects de nos communautés, accélérer le rythme du progrès et améliorer les chances d’équité économique. À mesure que progressera la persévérance scolaire et que s’amélioreront  les résultats scolaires dans les écoles intermédiaires et secondaires, ces gens deviendront des chefs de file au sein de l’économie et du marché de l’emploi. Plus les effectifs de gens bien formés et compétents augmenteront, plus on pourra s’attendre à des progrès dans le domaine social et dans celui de la santé. 

Participation et inclusion économiques atlantiques

Le développement de relations positives solides avec les provinces et les intervenants non autochtones du secteur privé partout dans la région est indispensable si nous, en tant que Premières nations, devons mettre en valeur le potentiel économique de nos jeunes. Il faut établir de puissants partenariats et des mesures axées sur des résultats si nous voulons tenir compte de cette population en pleine croissance. Les exigences des jeunes continuent de croître à mesure qu’apparaissent de nouvelles possibilités dans l’ensemble de la région atlantique. On doit confier à ces jeunes gens ayant reçu une formation des outils, des compétences et un accès à de vrais débouchés. Tout cela doit se faire par le biais de mesures proactives ciblées, privilégiant un secteur et une entreprise à la fois, pour faire en sorte que nos jeunes réussissent leur migration des Premières nations vers les divers centres urbains importants de la région atlantique. Un partenariat doit veiller à ce que les jeunes des Premières nations établissent un lien permanent avec les centres de formation et/ou les possibilités d’emploi; cela exige un effort de collaboration de la part des divers niveaux de gouvernement, des employeurs, des Premières nations et des organismes autochtones de soutien et d’aide à l’emploi. Il doit y avoir un lien entre l’offre de jeunes travailleurs autochtones et les possibilités d’emploi au sein des communautés de Premières nations et en dehors de ces communautés. Il sera indispensable d’assurer la transition et d’offrir de solides appuis pour faire en sorte que les jeunes et leurs familles demeurent dans un milieu urbain et ne soient pas incités à retourner dans les communautés des Premières nations à la suite d’une première crise. Il faut des ressources, des appuis, des aptitudes à affronter l’avenir, une préparation à la vie quotidienne pour s’assurer que les emplois durent plus d’un an et se transforment en carrières.

Plusieurs aspects de cette préparation à la vie quotidienne sont acquis par les étudiants des collèges communautaires et des universités qui effectuent la transition vers les villes. Mais il faut une attention soutenue, des appuis appropriés et du mentorat pour qu’ils demeurent en milieu urbain et y fassent carrière après avoir reçu une formation, car c’est en milieu urbain que se trouvent les possibilités économiques du Canada atlantique. La Stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain doit être centrée sur la région atlantique si l’on veut que les possibilités correspondent aux besoins. Le projet de Lower Churchill Falls de Terre-Neuve et Labrador et le projet fédéral de construction navale à Halifax sont de bons exemples de méga projets qui peuvent aider à créer des possibilités de développement et des emplois. Ces grands projets pourraient créer de nombreux emplois et carrières d’une durée de 30 à 40 ans et conviendraient donc parfaitement aux gens des Premières nations. Des stratégies doivent être élaborées dès maintenant pour faire en sorte que les gens soient liés à ces possibilités. L’expérience et les compétences acquises grâce au projet de Sydney Tar Ponds illustrent les méthodes innovatrices qui peuvent être retenues pour créer des emplois et des débouchés pour les Premières nations. Cet effort s’applique aussi au projet des chutes de Lower Churchill et à plusieurs autres grands projets concernant le Canada atlantique. Les jeunes des Premières nations doivent faire partie de l’équation et recevoir la formation bien avant le démarrage et la mise en œuvre de ces projets. Les expériences et les compétences acquises au cap Breton par le Unamaki Benefits Office, qui tablait sur la participation des cinq Premières nations du cap Breton, doivent être reproduites dans chacun des principaux centres urbains de la région atlantique pour faire en sorte que les liens soient établis entre les exigences de l’industrie et l’offre de main-d’œuvre des Premières nations.

Il faut intégrer les mesures aux résultats concrets qui produisent des emplois durables pour les jeunes qui souhaitent rester en milieu urbain et en faire leur nouveau lieu de résidence loin des Premières nations. Aujourd’hui, pour de nombreuses communautés, on met l’accent uniquement sur les ressources de la réserve pour construire une économie. Mais il y a un besoin pressant de se concentrer sur les besoins des autochtones qui vivent hors des réserves et de ceux qui veulent émigrer pour obtenir un entraînement conduisant à un emploi à long terme. Les employeurs et les gouvernements doivent regarder autour d’eux pour trouver des autochtones compétents qui permettront de combler les graves pénuries de main-d’œuvre et de compétences, qui ne feront qu’empirer au cours de la prochaine décennie.

L’industrie de la pêche et les Premières nations

Ces dernières années, le secrétariat du Congrès stratégique atlantique (CPA) des chefs des Premières nations a beaucoup travaillé avec toutes les Premières nations et avec le ministère des Pêches et Océans, les communautés s’employant à développer leurs capacités de gouvernance et d’exploitation commerciale en matière de pêches communautaires. Le CPA, dans le cadre d’un partenariat avec Ulnooweg, le ministère des Pêches et Océans et le ministère des Affaires autochtones et du Nord canadien a mis au point une approche innovatrice en vue d’accroître et de renforcer les capacités et les compétences techniques des Premières nations. Plus précisément, grâce à la collaboration de l’Initiative des pêches commerciales intégrées de l’Atlantique, des progrès réels ont été accomplis dans chaque communauté en vue de renforcer les capacités et d’accroître les résultats. La décision de la Cour suprême du Canada Marshall 1999, qui a confirmé nos droits issus de traités, a été un important point de départ pour l’inclusion et la participation de toutes les Premières nations à l’ensemble des activités de pêches du Canada atlantique. Aujourd’hui, plusieurs des Premières nations concernées créent des emplois et produisent des recettes qui appuient le développement économique et social de chacune de nos communautés. Pour soutenir ces efforts essentiels, il importe au plus haut point d’élaborer une approche commerciale et d’établir des indicateurs de rendement des affaires qui illustrent clairement les résultats obtenus dans chaque communauté.

Grâce à l’adoption d’une approche innovatrice fondée sur la collaboration entre le CPA et le ministère des Pêches et Océans et aux activités d’une Équipe de développement des affaires, nous avons été en mesure de centrer nos efforts sur les questions qui importent le plus aux communautés, comme le contrôle intégral par les Premières nations de tous les aspects des pêches, le mentorat et la formation, l’élaboration d’un plan d’entreprise, la gouvernance et le suivi du rendement des Premières nations par le truchement d’un système de gestion des pêches (SGP), la création d’une Équipe de développement des affaires (EDA) et l’embauche d’employés au CPA pour appuyer les efforts des communautés. Ces efforts, combinés à l’annonce l’année dernière de l’Initiative de partenariat stratégique du ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord, ont aidé les Premières nations à dépasser le stade de la simple cueillette et à entreprendre des activités plus diversifiées dans les pêches atlantiques. Les nouveaux efforts créent de nouveaux domaines d’activité et des emplois supplémentaires, tout en assurant une hausse des revenus des Premières nations. L’annonce d’août 2010 et la mise en œuvre par le ministère des Affaires indiennes et du Développement du Nord (maintenant Affaires autochtones et Développement du Nord) a créé une nouvelle synergie et des efforts de concertation fondés sur les nouvelles possibilités d’affaires qui surgissent au sein de nos communautés. Cet effort concorde avec le nouveau Cadre de développement économique pour les autochtones, qui a pour objet de coordonner les efforts gouvernementaux et d’établir de solides liens de collaboration destinés à appuyer les résultats économiques au niveau des Premières nations.

Services de santé

Dans le domaine de la santé, il y a plusieurs questions et enjeux auxquels se heurtent les Premières nations par suite de la petite taille de la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits de Santé Canada dans la région atlantique et de la nécessité de travailler avec les quatre provinces atlantiques. Les principales mesures doivent être placées par Santé Canada pour assurer la cohérence des priorités des Premières nations avec le travail qui se poursuit dans chacune des provinces.

Viabilité du financement

Le Canada atlantique revêt un caractère particulier puisque 75 % de nos communautés des Premières nations sont des « communautés de transfert », ce qui signifie qu’elles ont une influence importante sur le financement de la santé et sur les modalités de son utilisation dans la communauté. Toutefois, l’écart actuel de financement au titre des transferts aux communautés (3 %), notamment aux petites communautés, soulève d’importantes difficultés. L’approche et la formule utilisée pour les communautés des Premières nations en matière de financement doivent être révisées en se fondant sur une norme commune, et ce, afin de tenir compte, non seulement des données démographiques, mais aussi des besoins réels et d’un éventail de programmes et de services comparables accessibles à toutes les Premières nations de la région. Le financement fondé sur des plans et des stratégies de santé des Premières nations est nécessaire pour établir un lien entre le financement et les résultats. Il faut une comptabilité rigoureuse fondée sur des faits à l’échelon de la communauté pour toutes nos communautés des Premières nations.

Santé mentale et toxicomanie

La santé mentale et la toxicomanie continuent d’être un enjeu important dans les communautés des Premières nations atlantiques. Les programmes de santé mentale sont presque inexistants et exigent un financement spécialisé pour la région atlantique reposant sur la stratégie approfondie élaborée en collaboration avec les Premières nations de la région. Les problèmes de toxicomanie se limitaient autrefois uniquement à la consommation d’alcool, mais comportent maintenant des aspects plus complexes liés à l’abus de médicaments et aux drogues illicites.

Abus concernant les médicaments sur ordonnance

Ces dernières années, on a observé une augmentation des cas d’abus de médicaments sur ordonnance au sein des communautés des Premières nations atlantiques et il a fallu faire appel à la collaboration et prendre des mesures bien ciblées. Les problèmes traditionnels de toxicomanie, comme la consommation excessive d’alcool, demeurent graves. Toutefois, il faut accorder une plus grande attention à la mauvaise utilisation et aux abus de médicaments d’ordonnance, comme les opioïdes et les benzodiazepines (Benzos). Ce problème exige une approche régionale intégrée fondée sur la collaboration. Seule une telle approche permettra de s’attaquer à tous les aspects du problème de manière efficace.

Enfants et jeunes

Les services destinés aux enfants et aux jeunes vivant dans les communautés des Premières nations doivent être améliorés car leurs responsables se heurtent à d’importants problèmes. Les jeunes ont besoin d’un programme positif pour devenir des adultes sains et bien ajustés et pour éviter les graves problèmes de toxicomanie ou de suicide découlant d’un manque total d’espoir. Les programmes, les services et les appuis doivent habiliter les jeunes. À l’heure actuelle, il y a des lacunes graves dans les programmes de jeunes à l’échelon communautaire.

Programmation fondée sur les preuves dans les communautés des Premières nations

Fusionner la comptabilité annuelle communautaire reposant sur les accords de financement et les exigences en matière de comptabilité avec la collecte des principales données en matière de santé dans le cadre d’un document papier ou d’un document électronique allégera la charge de travail comptable pesant sur les communautés tout en facilitant la collecte des données relatives à la santé permettant aux communautés de prendre des décisions éclairées en matière de planification communautaire de santé et de services axés sur les besoins. Une comptabilité rigoureuse fondée sur les faits à l’échelon communautaire s’impose.

Logement et infrastructure

La population croissante des Premières nations a entraîné une augmentation de la demande de logements et d’infrastructure. Il faut des investissements directs supplémentaires en matière de logement pour toutes les Premières nations en vue de pallier les besoins croissants pour des unités de logement. Dans la région atlantique, il faut au moins 3 000 nouvelles unités pour répondre à la demande et aux besoins des familles de plus en plus nombreuses dans toutes les communautés. Compte tenu des budgets actuels établis par la SCHL et le ministère des Affaires autochtones et du Nord canadien, il faudra des décennies pour répondre aux besoins qui existent aujourd’hui. De nouveaux fonds sont requis pour fournir les logements dont ont besoin les Premières nations de la région et du reste du Canada.

Dans le domaine des infrastructures, l’Évaluation technique nationale que l’on a récemment effectuée fait état de la situation urgente à laquelle se heurtent les communautés des Premières nations. Le rapport constitue un point de départ pour l’élaboration d’un plan à long terme permettant de régler ce problème. Compte tenu de la situation actuelle du plan d’immobilisations à long terme du ministère des Affaires autochtones et du Développement du Nord et des niveaux actuels de ressources, il faudra au moins 300 ans pour répondre aux besoins que l’on a relevés. Cette situation n’est pas acceptable et il faut des investissements massifs pour s’attaquer à cette crise des infrastructures au sein des Premières nations. La situation expose les gens et les familles à des risques graves où les systèmes communautaires ne fonctionnement pas correctement et doivent être modernisés. L’élaboration de normes et d’un régime de réglementation appropriés s’impose si l’on veut que la situation s’améliore. 

La nécessité de protéger l’eau de source, l’eau et les eaux usées est une des principales priorités des chefs, qui souhaitent collaborer avec le gouvernement fédéral pour régler ce problème au cours des prochaines années. Tout régime doit tenir compte de tous les coûts à court et à long terme. Il importe au plus haut point que les Premières nations aient un régime qui fonctionne et dont la qualité, les services et les normes soient d’un niveau égal à ceux des communautés non autochtones du pays.

Recommandations et besoins d’investissement

  • Le renouvellement immédiat du financement de 10 millions de dollars par année pour assurer une reconduction sur 5 ans de l’Initiative des pêches commerciales intégrées de l’Atlantique du MPO.
  • Établissement d’une majoration des coûts et des prix pour tout le financement des programmes de base des Premières nations, les services sociaux, d’éducation, d’infrastructure, de logement, de santé et autres services essentiels devant être offerts au cours de la prochaine décennie à un taux de base de 10 % par année pour assurer l’égalité des services de base avec ceux qui sont offerts à tous les Canadiens.
  • Investissement d’au moins 10 millions de dollars de plus par année pour appuyer la transition des Premières nations vers des emplois et des formations dans les grands centres de l’Atlantique et dans les secteurs économiques clés du Canada atlantique.